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Graver l'amitié

La gravure n’est pas un métier, c’est plusieurs métiers ensemble. Elle est devenue l’un des lieux où le Schématisme a trouvé, pour moi, un contrepoint essentiel.

Voici une autre grande région où j’ai pu aventurer mon entreprise artistique. Toujours dans l’amour de l’artisanat et le respect des artisans qui m’ont transmis leur savoir vrai. De ce savoir, il n’appartient à l’artiste que de l’apprendre humblement, pour en faire langage.

Rencontrer Robert Dutrou

Au commencement, il y a un rêve d’enfant. Il y a toujours un rêve d'enfant. L'important est de garder son rêve vivant.

Puis vient la vie, les rencontres qui se font ou pas. Bien longtemps après, vers 50 ans, je rencontre Robert Dutrou, maître-graveur.

Il avait suivi tous les stades d’apprentissages dans l’atelier de Lacourrière, et avait travaillé avec Chagall, Braque, Picasso, Mirö… Je l’ai connu quand il a créé la Métairie, un atelier d’art graphique, dans le même esprit que ce qu’avait fait Maeght à Saint-Paul-de-Vence. On était copains, on se parlait, mais il ne me venait pas à l’idée de faire de la gravure ; c’est lui qui m’a dit « Pourquoi ne te lancerais-tu pas ? ». Et il m’a appris.

Robert m’a donné une plaque de cuivre.

Le passage

C’est au XXe siècle que la gravure a conquis le statut dont elle jouit aujourd’hui. Tu peux en faire une et considérer que c’est une œuvre d’art, ce qui n’était pas le cas jusqu’au XIXe. Avec les gravures, j’estime n’en être encore qu’à l’apprentissage. 

En général, les artistes n’ont pas appris suffisamment pour se débrouiller sans graveur. Il y a énormément de coups de main, de choses à savoir, dans les gestes d’un artisan maître graveur. En tant qu’artiste, on les apprend petit à petit, afin d’organiser notre œuvre en fonction de cette compétence. On sait ce qu’on veut, mais on ne sait pas ce que veut la plaque de cuivre : c’est le graveur qui nous le dit.

Chez Robert Dutrou, j’ai voulu quitter les chemins traditionnels de la gravure.

J’ai gravé sur aluminium, sur plastique, j’ai mêlé le métal avec le bois, du dessin avec des impressions de tissu, un tas de choses. J’ai fait mes gammes.

Robert fut mon pédagogue. Il m’a laissé faire mes essais, mes erreurs, venant de temps en temps me conseiller, m’orienter, sans jamais être directif. Toujours là quand je l’appelais. Jusqu’au jour où il m’a dit : « Celle-là elle me plaît, tu me la donnes ! » Ce fut une parole importante : par elle, le maître graveur me signifiait que techniquement elle était valable. Il me reconnaissait le savoir de la gravure. C’était vers 1995. Si on avait été au XVIIesiècle, j’aurais vécu ça comme un « passage »… C'en fut un.

Jacques Caux

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